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lundi 11 avril 2016

" De nos ombres ... "

                                   " Après tout, à la guerre,
Un homme, c'est de l'ombre, et ça ne compte guère"
   Victor Hugo *

Photo de Jacques Clauzel à la source du poème ci-dessous.




De nos ombres avides
Vient de surgir
Ce visage supplicié

Hors des nuits
Du doute
S'écartant de la face
Proche et sombre
Qui nous rive au mal
Se trament
L'esquisse d'un sourire
Et nos lentes résurrections

Les yeux clos
Nous inventerons
Nos métamorphoses
Puis l'ascension
Vers l'éclat
La brève étincelle
De nos singulières vies.

Andrée Chedid **



  • " L'ombre de ton ombre ... "





Notes:
  * Victor Hugo, La Légende des siècles, XXI, Le cimetière d'Eylau, in O.C., Poésie III, Bouquins p.484
** poème extrait de " Ombres portées, 30 photographies de Jacques Clauzel, 30 poèmes contemporains", éd. Tipaza (2003), p. 42.  A propos de cet ouvrage il est précisé que trente poètes ont été invités à composer un texte en regard de la photographie qui leur était proposée. La photo de Jacques Clauzel ici reproduite est celle placée page 43 en regard du poème d'Andrée Chedid.

Liens :  
   ¤ Jacques Clauzel, artiste peintre, photographe : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Clauzel 
   ¤ Jacques Brel, Ne me quitte pas / No me abandones (subtitulos en español) : https://www.youtube.com/watch?v=adjroSu1RB0


 

samedi 18 juillet 2015

" Le pauvre petit cheval ! "



[...]
Le pesant chariot porte une énorme pierre ;
Le limonier, suant du mors à la croupière,
Tire, et le roulier fouette, et le pavé glissant
Monte, et le cheval triste a le poitrail en sang.
Il tire, traîne, geint, tire encore et s’arrête;
Le fouet noir tourbillonne au-dessus de sa tête ;
C’est lundi ; l’homme hier buvait aux Porcherons
Un vin plein de fureur, de cris et de jurons ;
Oh ! quelle est donc la loi formidable qui livre
L’être à l’être, et la bête effarée à l’homme ivre !
L’animal éperdu ne peut plus faire un pas ;
Il sent l’ombre sur lui peser ; il ne sait pas,
Sous le bloc qui l’écrase et le fouet qui l’assomme,
Ce que lui veut la pierre et ce que lui veut l’homme.
Et le roulier n’est plus qu’un orage de coups
Tombant sur ce forçat qui traîne les licous,
Qui souffre et ne connaît ni repos ni dimanche.
Si la corde se casse, il frappe avec le manche,
Et, si le fouet se casse, il frappe avec le pied ;
Et le cheval, tremblant, hagard, estropié,
Baisse son cou lugubre et sa tête égarée ;
On entend, sous les coups de la botte ferrée,
Sonner le ventre nu du pauvre être muet !
Il râle ; tout à l’heure encore il remuait ;
Mais il ne bouge plus et sa force est finie ;
Et les coups furieux pleuvent ; son agonie
Tente un dernier effort ; son pied fait un écart,
Il tombe, et le voilà brisé sous le brancard ;
Et, dans l’ombre, pendant que son bourreau redouble,
Il regarde Quelqu’un de sa prunelle trouble ;
Et l’on voit lentement s’éteindre, humble et terni,
Son œil plein des stupeurs sombres de l’infini,
Où luit vaguement l’âme effrayante des choses.
Hélas !
[...]   
   Victor Hugo, Les Contemplations, L. III, Les luttes et les rêves, II Melancholia (Paris juillet 1838). O.C., Poésie II, Robert Laffont, coll. Bouquins p.333.
 




   [… ]
   « Rodia s’approche du petit cheval; il s’avance devant lui ; il le voit frappé sur les yeux, oui sur les yeux ! Il pleure. Son cœur se gonfle; ses larmes coulent. L’un des bourreaux lui effleure le visage de son fouet ; il ne le sent pas, il se tord les mains, il crie, il se précipite vers le vieillard à la barbe blanche qui hoche la tête et semble condamner cette scène. Une femme le prend par la main et veut l’emmener ; il lui échappe et court au cheval, qui à bout de forces tente encore de ruer.
   – Le diable t’emporte, maudit ! vocifère Mikolka dans sa fureur. Il jette le fouet, se penche, tire du fond de la carriole un long et lourd brancard et, le tenant à deux mains par un bout, il le brandit péniblement au-dessus de la jument rouanne.
   – Il va l’assommer, crie-t-on autour de lui.
   – La tuer.
   – Elle est à moi, hurle Mikolka ; il frappe la bête à bras raccourcis. On entend un fracas sec.
   – Fouette-la, fouette-la, pourquoi t’arrêtes-tu ? crient des voix dans la foule. Mikolka soulève encore le brancard, un second coup s’abat sur l’échine de la pauvre haridelle. Elle se tasse ; son arrière-train semble s’aplatir sous la violence du coup, puis elle sursaute et se met à tirer avec tout ce qui lui reste de forces, afin de démarrer, mais elle ne rencontre de tous côtés que les six fouets de ses persécuteurs ; le brancard se lève de nouveau, retombe pour la troisième fois, puis pour la quatrième, d’une façon régulière. Mikolka est furieux de ne pouvoir l’achever d’un seul coup.
   – Elle a la vie dure, crie-t-on autour de lui.
   – Elle va tomber, vous verrez, les amis, sa dernière heure est venue, observe un amateur, dans la foule.
   – Prends une hache, il faut en finir d’un coup, suggère quelqu’un.
   – Qu’avez-vous à bayer aux corneilles ? place !  hurle Mikolka. Il jette le brancard, se penche, fouille de nouveau dans la charrette et en retire cette fois un levier de fer.
   – Gare, crie-t-il ; il assène de toutes ses forces un grand coup à la pauvre bête. La jument chancelle, s’affaisse, tente un dernier effort pour tirer, mais le levier lui retombe de nouveau pesamment sur l’échine ; elle s’abat sur le sol, comme si on lui avait tranché les quatre pattes d’un seul coup.
   – Achevons-la, hurle Mikolka ; il bondit, pris d’une sorte de folie, hors de la charrette.
Quelques gars, aussi ivres et cramoisis que lui, saisissent ce qui leur tombe sous la main : des fouets, des bâtons, ou un brancard, et ils courent sur la petite jument expirante. Mikolka, debout près d’elle, continue à frapper de son levier, sans relâche. La pauvre haridelle allonge la tête,pousse un profond soupir et crève.
   – Il l’a achevée ! crie-t-on dans la foule.
   – Et pourquoi ne voulait-elle pas galoper ?
   – Elle est à moi », crie Mikolka, son levier à la main. Il a les yeux injectés de sang et semble regretter de n’avoir plus personne à frapper.
   – Eh bien, vrai, tu es un mécréant, crient plusieurs assistants dans la foule.
   Mais le pauvre garçonnet est hors de lui. Il se fraye un chemin, avec un grand cri, et s’approche de la jument rouanne. Il enlace son museau immobile et sanglant, l’embrasse ; il embrasse ses yeux, ses lèvres, puis il bondit soudain et se précipite, les poings en avant, sur Mikolka. Au même instant, son père qui le cherchait depuis un moment, le découvre enfin, l’emporte hors de la foule...
   – Allons, allons, lui dit-il, allons-nous-en à la maison.
   – Petit père, pourquoi ont-ils tué... le pauvre petit cheval ? sanglote l’enfant. Mais il a la respiration coupée et les mots s’échappent de sa gorge contractée en cris rauques.
   – Ce sont des ivrognes, ils s’amusent ; ce n’est pas notre affaire, viens ! dit le père. Rodion l’entoure de ses bras, mais sa poitrine est serrée dans un étau de feu ; il essaie de reprendre son souffle, de crier – et s’éveille.  
   Raskolnikov s’éveilla, le corps moite, les cheveux trempés de sueur, tout haletant et se souleva plein d’épouvante.
    – Dieu soit loué ; ce n’était qu’un rêve, dit-il en s’asseyant sous un arbre ; il respira profondément.
    « Mais qu’est-ce donc ? Une mauvaise fièvre qui commence ? Ce songe affreux me le ferait   croire ! » 
   […]

     Dostoievski, Crime et Châtiment, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, trad. D. Ergaz, 1950, p.100 à 103.






Dorian Astor, Nietzsche, Gallimard, folio biographies, 2011, p.352

             * * *                 
Jean Rochefort lit un extrait de C'est la guerre de Louis Calaferte sur la réquisition des chevaux pour l'armée durant la seconde guerre mondiale.



* * *
Références :
   ¤ Dorian Astor et Nietzsche : http://www.franceculture.fr/oeuvre-nietzsche-de-dorian-astor.html
   ¤ Louis Calaferte, C'est la guerre, Gallimard, folio, p. 81 à 85.
   ¤  Louis Calaferte sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Calaferte

mercredi 14 janvier 2015

CHARLIBERTE D'EXPRESSION



M E R C R E D I   7   J A N V I E R   2 0 1 5   ! ! ! ! ! !  ? ? ? ? ? ?
  



 CHARLIE HEBDO




J E U D I   8   J A N V I E R  à m i d i :   R e c u e i l l e m e n t  .


Minute de silence en hommage aux victimes devant nos mairies.


  
 S A M E D I   1 0   J A N V I E R , 14 h 30  .   D e u i l  .

 

 

A Recloses, Seine-et-Marne, où il habitait, hommage est rendu à Frédéric Boisseau, 42 ans, agent de maintenance de la Sodexo, première victime de la barbarie au siège de Charlie Hebdo.




 D I M A N C H E   1 1   J A N V I E R  , 15 h.   

                          PARIS : humour  et chagrin mêlés.



L'Europe, à laquelle se joignent d'autres pays du monde,  est solidaire de la France en ce 11 janvier 2014

Humour d'un publiciste, tonalité Charlie, bd des Filles du Calvaire

                14h45. Passé le Cirque d'Hiver, longue attente près du 42 boulevard du Temple. Là vécut un temps Gustave Flaubert.                          

Au même endroit, la grande fresque. Auteur ?






LIBERTÉ       ÉGALITÉ          FRATERNITÉ

RIRE . DESSINER . SEX ' PRIMER . Au fond, la Bourse du Travail.


Crayon, Cœur et C . . . . . . . C'est "l'esprit" Charlie ! (voir ci-dessous)



 AUX LECTEURS

Amis lecteurs, qui ce livre lisez,
Despouillez-vous de toute affection,
Et, le lisant,, ne vous scandalisez;
Il ne contient mal ne infection.
Vray est qu'icy peu de perfection
Vous apprendrez, sinon en cas de rire *;
Aultre argument ** ne peut mon cueur élire,
Voyant le dueil qui vous mine et consomme;
Mieux est de ris que de larmes escripre,
Pour ce que rire est le propre de l'homme.

Voir ci-contre . . .


"HOMMAGE AUX 17 VICTIMES . VOUS ÊTES DANS NOS CŒURS"

Sous le regard de Marilyn.

" ... tous ensemble, tous debout. "

"LIBERTÉ. LIBERTÉ. LIBERTÉ..., scande cette femme.

A 16h, nous accédons à la place de la République.



Qui dira que l'humour niais pas présent dans cet hommage ?

Sur le clavier, parmi les couleurs, s'écrit ton nom.




Descartes : prénom, Charlie


. . . signé Les Inconnus in "Jésus II, le Retour".

" Place de la liberté d'expression "
VOLTAIRE
                                  A 17 h. nous empruntons le boulevard Voltaire.


C H A R B





"L'AMOUR PLUS FORT QUE LA HAINE"

   "Sur mes refuges détruits
      Sur mes phares écroulés
          Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom  . . .
"


et maintenant ?

L’espoir luit comme un brin de paille dans l’étable.
Que crains-tu de la guêpe ivre de son vol fou ?
Vois, le soleil toujours poudroie à quelque trou.
Que ne t’endormais-tu, le coude sur la table ?
Pauvre âme pâle, au moins cette eau du puits glacé,
Bois-la. Puis dors après. Allons, tu vois, je reste,
Et je dorloterai les rêves de ta sieste,
Et tu chantonneras comme un enfant bercé.

Midi sonne. De grâce, éloignez-vous, madame.
Il dort. C’est étonnant comme les pas de femme
Résonnent au cerveau des pauvres malheureux.

Midi sonne. J’ai fait arroser dans la chambre.
Va, dors ! L’espoir luit comme un caillou dans un creux.
Ah ! quand refleuriront les roses de septembre !

Paul Verlaine, Sagesse (1881). L. de P. n°1116 p.136


 . . . et puisqu'on dit qu'en France tout termine par des chansons, un chant d'amour et        
de résistance :

Ma France
De plaines en forêts de vallons en collines
Du printemps qui va naître à tes mortes saisons
De ce que j'ai vécu à ce que j'imagine
Je n'en finirais pas d'écrire ta chanson, ma France

Au grand soleil d'été qui courbe la Provence
Des genêts de Bretagne aux bruyères d'Ardèche
Quelque chose dans l'air a cette transparence
Et ce goût du bonheur qui rend ma lèvre sèche, ma France

Cet air de liberté au-delà des frontières
Aux peuples étrangers qui donnaient le vertige
Et dont vous usurpez aujourd'hui le prestige
Elle répond toujours du nom de Robespierre, ma France

Celle du vieil Hugo tonnant de son exil
Des enfants de cinq ans travaillant dans les mines
Celle qui construisit de ses mains vos usines
Celle dont monsieur Thiers a dit qu'on la fusille, ma France

Picasso tient le monde au bout de sa palette
Des lèvres d'Éluard s'envolent des colombes
Ils n'en finissent pas tes artistes prophètes
De dire qu'il est temps que le malheur succombe, ma France

Leurs voix se multiplient à n'en plus faire qu'une
Celle qui paie toujours vos crimes vos erreurs
En remplissant l'histoire et ses fosses communes
Que je chante à jamais celle des travailleurs, ma France

Celle qui ne possède en or que ses nuits blanches
Pour la lutte obstinée de ce temps quotidien
Du journal que l'on vend le matin d'un dimanche
A l'affiche qu'on colle au mur du lendemain, ma France

Qu'elle monte des mines descende des collines
Celle qui chante en moi la belle la rebelle
Elle tient l'avenir, serré dans ses mains fines
Celle de trente-six à soixante-huit chandelles, ma France.
                        Jean Ferrat, paroles et musique.



Notes :
* En matière de rire
** Sujet
Références
 - si des hélicoptères tournaient dans le ciel parisien, la photo d'hélicoptère présente ici  avait été prise à New York
 - "Aux lecteurs" : Rabelais, Gargantua, O.C., La Pléiade, p.2
 - poème de Gustavo Adolfo Bécquer (Séville 1836 - Madrid 1870) in Anthologie bilingue de la poésie espagnole, La Pléiade, p.540. Traduction  personnelle. Poème extrait de El libro de los gorriones
  - légende de la photo au graffiti "liberté", texte: P. Eluard, Liberté, 1942, extrait (strophe 18)
  - légende de la dernière illustration : couvercle d'un pot de miel; fond: partie de la couverture d'un cahier Cambridge illustrée par J.P. Barthe

Liens :
 - URL de la 1ière image, poing dressé : https://encrypted-tbn3.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcRiKw_L19jxdxpykAB2XOEx5nRlhDF0l8XubffaCaHlqW02uVRK
 -  URL de la 2e photo, "recueillement" :  http://www.valerie-lacroute.fr/
 - à propos de la manif :  http://fr.wikipedia.org/wiki/Manifestations_des_10_et_11_janvier_2015
 - Charlie Hebdo, l'historique :  http://fr.wikipedia.org/wiki/Charlie_Hebdo
 - Gustavo Adolfo Bécquer: http://fr.wikipedia.org/wiki/Gustavo_Adolfo_B%C3%A9cquer
 - Paul Verlaine : http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Verlaine
 - Jean-Paul Barthe, illustrateur : http://www.bepub.com/portfolio-jean-paul-barthe/#realisations
 - Jean Ferrat, Ma France : https://www.youtube.com/watch?v=qkO7_rhhCbA